Jean DUFOURNET, Le Roman de Renart, entre réécriture et innovation, 250 p.  Les éditions Paradigme qui avaient déjà publié en 1993 Du Roman de Renart à Rutebeuf ont eu la bonne idée de rassembler cette fois douze articles que J. Dufournet a consacrés, de 1971 à 2006, au Roman de Renart et à ses avatars.
Le recueil s’ouvre par une présentation générale (p. 7-17) de cet ensemble de vingtsix branches où l’A. distingue trois groupes : les récits composés entre 1175 et 1180, les contes écrits entre 1180 et 1200, enfin les derniers rédigés entre 1205 et 1250 ; il dégage aussi les sources mythiques, folkloriques et littéraires avant de souligner les « deux principes créateurs de l’arborescence et de la réécriture » à l’oeuvre dans ce « texte du ressassement » où l’on remarque d’une branche à l’autre, voire à l’intérieur d’une même branche des jeux subtils « d’amplifications, d’inversions et de variations » (p. 11). Si la plupart de ces récits se structurent autour de quêtes de nourriture et de justice, c’est la ruse qui confère au Roman de Renart une certaine unité. J.D. s’attache de surcroît à réhabiliter plusieurs branches qui ont mauvaise réputation, comme Le Siège de Maupertuis, La Confession de Renart, Renart le noir et Le Partage des proies. Grâce à un examen minutieux de ces récits dénigrés par la critique littéraire, il démontre avec perspicacité et finesse les intérêts et les mérites de chacun avec les quatre articles suivants : Défense et illustration de la branche Ia du Roman de
Renart (p. 19-41), La réécriture dans la Confession de Renart (branche VII du Roman de Renart). Jeux et enjeux (p. 43-54), Renart le noir : réécriture et quête de l’identité (p. 115- 136), Littérature oralisante et subversion : la branche XVIII du Roman de Renart ou le partage des proies (p. 161-184). La branche de Liétard est l’objet d’une double étude, comparative avec les Vêpres de Tibert dans Réécriture et arborescence dans le Roman de Renart (branches X et XI). Deux auteurs au travail (p. 55-76), et sociologique avec Portrait d’un paysan du Moyen Âge : le vilain Liétard (p. 77-114). Les innovations apportées par chaque conteur et les spécificités de chaque branche sont clairement expliquées comme c’est encore le cas pour L’originalité de la branche XVII du Roman de Renart ou les trois morts du goupil (p. 137-159). J.D. propose aussi un compte rendu précis de la thèse de J. Scheidegger, Le Roman de Renart ou le texte de la dérision, avant de s’intéresser aux adaptations modernes du roman médiéval avec le Renert luxembourgeois de M. Rodange (p. 191-206), Le Roman de Renard de M. Genevoix (p. 207-230), Le Roman de Renart d’A.M. Schmidt et la bande dessinée-série noire, Le Polar de Renard de J.G. Imbar et J.L. Hubert (p. 231-248).
En définitive l’ouvrage de J.D. illustre parfaitement la vitalité du Roman de Renart qui, à travers toutes ces réécritures et ces adaptations du Moyen Âge à notre époque, ne cesse de se renouveler pour notre plus grand plaisir.

Claude LACHET